Assurance incendie et divorce...ALERTE
Contexte de l'affaire
Deux époux sont copropriétaires indivis d'un immeuble et de son contenu. Les époux divorcent. Un des époux souscrit, après divorce, un contrat d'assurance couvrant l'immeuble et son contenu. Un incendie intervient alors que les opérations de liquidation partage ne sont pas closes. L'assureur ne paie que la moitié du sinistre.
Arrêt de la Cour de Cassation
Dans un arrêt du 25 avril 2013, la Cour de Cassation va entériner le raisonnement de l'assureur en suivant le raisonnement suivant :
- D’une part, l’article 39, alinéa 1er, de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre prévoit que la prestation due par l’assureur en vertu d’une assurance à caractère indemnitaire est limitée au préjudice subi par l’assuré.
- D’autre part, en vertu de l’article 1er, B, a), de la même loi, on entend par assuré, dans une assurance de dommages, la personne garantie par l’assurance contre les pertes patrimoniales.
Le contrat d’assurance a été souscrit par le mari, après la transcription du divorce des intéressés et le questionnaire d’assurance « ne mentionne pas […] l’indivision de l’immeuble entre l’assuré et son ex-épouse ».
Position de la Cour de Cassation
La Cour de Cassation refusera de suivre la Cour d'Appel qui avait considéré qu’ « après la transcription de leur divorce, les intéressés sont donc tombés sous l’empire du régime ordinaire de la copropriété », qu’en vertu de l’article 577-2 du Code civil, chaque copropriétaire peut « accomplir seul tous les actes purement conservatoires et les actes d’administration provisoire » et que « le fait de conclure le contrat d’assurance ‘Incendie Multirisk 2003 Habitation’ relève dans le chef [du défendeur] de l’administration provisoire du bien indivis ».
La Cour considéra, alors, que l’arrêt, qui condamne l'assurance à payer au défendeur une indemnité réparant l’intégralité des dégâts causés par l’incendie, étend le bénéfice du contrat d’assurance à un tiers à celui-ci et alloue une indemnité supérieure au préjudice subi par le défendeur et, partant, viole les articles 1165 du Code civil, 1er, B, a), et 39 de la loi du 25 juin 1992.
Recommandations
Il est dès lors hautement recommandable, lors de la souscription d'un contrat d'assurance de choses, d'interroger le preneur sur la nature et l'étendue de ses droits sur celle-ci.
Clarifications de la Cour
Dans le cadre strict de la LCAT, la Cour s'exprime clairement en énonçant "Il suit de ces dispositions qu’en règle, l’assurance contre le péril d’incendie souscrite en nom personnel par un copropriétaire indivis du bien assuré ne couvre que sa part de propriété et ne bénéficie pas aux autres copropriétaires, sauf s’il résulte de l’assurance que le preneur a agi pour leur compte".
Questions soulevées
La solution est tellement choquante sur le plan du bon sens et de l'équité que de légitimes questions méritent d'être posées :
- L'issue aurait-elle été identique si la déclaration de sinistre (ou la procédure) avait été conjointement diligentée par les deux ex-époux ?
La Cour suprême souligne en effet que des énonciations de l'arrêt entrepris, il ne résulte pas que Monsieur X a agi pour le compte de son ex-épouse.
Possibilité d'assurance pour compte
Rappelons, néanmoins, que rien n'empêche le preneur de souscrire une assurance pour compte (article 38 de la LCAT). Il serait donc judicieux de souscrire les contrats "en son nom personnel et au nom de tout autre indivisaire pour compte de qui appartiendra". Par ailleurs, toute demande d'indemnisation, toute procédure éventuelle devra impérativement être introduite au nom de tous les titulaires d'un droit réel sur la chose.