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La faute lourde doit être déterminée limitativement et expressément

Denis Gouzée Denis Gouzée

L'article souligne qu'en matière d'assurance, la faute lourde doit être définie de manière précise et limitée dans les contrats. La Cour de cassation a rappelé ce principe dans un arrêt du 17 septembre 2020, où une assurance a refusé de couvrir un sinistre en invoquant une clause d'exclusion jugée trop générale. Selon la loi de 1992, l'assureur ne peut s'exonérer de ses obligations que pour des fautes lourdes clairement spécifiées. La décision de la cour d'appel a été cassée, confirmant que des termes vagues ne suffisent pas pour exclure la couverture d'assurance.
Illustration
Assurance - Responsabilité - Roulage

Exclusion de couverture d'assurance en cas de faute lourde

Dans de nombreuses polices d’assurances, notamment en responsabilité professionnelle, la faute lourde exclue de la couverture d’assurance est déterminée en des termes trop généraux et ne peut donc trouver à s’appliquer. Ce principe fondamental a été rappelé dans un arrêt récent de la Cour de cassation du 17 septembre 2020.

Cas de sinistre et clause d'exclusion

Dans le cadre d’un sinistre pour lequel la responsabilité de l’entrepreneur était mise en cause, la compagnie d’assurances invoquait comme exclusion :

"ne sont pas couverts, les dommages causés par votre faute lourde, c’est-à-dire :
  • l’acceptation et l’exécution de travaux alors que vous auriez dû être conscient que vous ne disposiez pas de la compétence nécessaire, des connaissances techniques, des moyens humains ou matériels pour pouvoir exécuter les engagements pris ;
  • les infractions graves aux réglementations sur la sécurité ou aux lois, règlements ou usages propres à vos activités, alors que vous auriez dû savoir qu’il en résulterait presque inévitablement un dommage ;

Décision de la cour d'appel

La cour d’appel avait considéré que la clause d’exclusion devait être appliquée et que, dès lors, le sinistre n’était pas couvert au motif que :

En l’espèce, la société CGB Construction ne disposait pas de plans précis d’exécution, mais simplement des plans destinés à l’obtention du permis d’urbanisme, qui mentionnaient des vides ventilés. La société CGB Construction a accepté d’effectuer des terrassements plus importants pour permettre la réalisation de caves et ce, sans en référer à l’architecte. Elle devait savoir qu’elle ne disposait pas des connaissances techniques suffisantes en matière de stabilité pour apprécier la faisabilité de tels terrassements.
Elle n’est ni architecte ni ingénieur en stabilité et elle ne disposait pas des connaissances techniques requises pour s’écarter du plan de l’architecte ;
[Elle] a dès lors commis une faute lourde au sens de l’article 20.2 des conditions générales de la police d’assurance.
Cet article n’est pas rédigé en des termes vagues ou généraux. Il fait référence à la nécessité d’être conscient de ne pas disposer de la compétence nécessaire, des connaissances techniques, des moyens humains ou matériels pour pouvoir exécuter les travaux. Cet article permet à un entrepreneur de cerner aisément les comportements qui sont constitutifs de faute lourde.

Pourvoi et décision de la Cour de cassation

Saisie du pourvoi, la Cour de cassation cassera cette décision :

En vertu de l’article 8, alinéa 2, de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre, applicable au litige, l’assureur répond des sinistres causés par la faute, même lourde, du preneur d’assurance, de l’assuré ou du bénéficiaire ; toutefois, l’assureur peut s’exonérer de ses obligations pour les cas de faute lourde déterminés expressément et limitativement dans le contrat.
Cette disposition exclut que l’assureur s’exonère de sa garantie pour des cas de faute lourde de l’assuré déterminés en termes généraux.
L’arrêt, qui considère que “cet article n’est pas rédigé en des termes vagues ou généraux” dès lors qu’“il fait référence à la nécessité d’être conscient de ne pas disposer de la compétence nécessaire, des connaissances techniques, des moyens humains ou matériels pour pouvoir exécuter les travaux” et “permet à un entrepreneur de cerner aisément les comportements qui sont constitutifs de faute lourde”, et que l’entrepreneur “a commis une faute lourde au sens de [cette disposition]”, en sorte que la défenderesse “est fondée à ne pas couvrir le sinistre”, viole l’article 8, alinéa 2, précité.

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