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L’interruption de la prescription et la déclaration de sinistre

Denis Gouzée Denis Gouzée

L'article 89, § 5, de la loi du 4 avril 2014 stipule que la prescription de l'action contre l'assureur est interrompue lorsque la personne lésée exprime sa volonté d'obtenir une indemnisation. Cette interruption prend fin lorsque l'assureur communique sa décision par écrit. La Cour de cassation souligne que l'assureur doit clarifier sa position afin que la personne lésée puisse savoir si elle sera indemnisée. Une offre de règlement ne constitue pas une décision définitive si elle est conditionnée par des réserves. De plus, la notification de la décision de l'assureur doit être faite personnellement à la personne lésée ou à son mandataire.
Illustration
Assurance - Responsabilité - Roulage

Interruption de la Prescription en Droit des Assurances

En vertu de l'article 89, § 5, de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances, la prescription de l'action résultant du droit propre que la personne lésée possède contre l'assureur est interrompue dès que l'assureur est informé de la volonté de la personne lésée d'obtenir l'indemnisation de son préjudice et cette interruption cesse au moment où l'assureur fait connaître par écrit, à la personne lésée, sa décision d'indemnisation ou son refus.

Rappel de la Cour de Cassation

La Cour de cassation dans un arrêt du 20.9.2021 vient de rappeler qu’il appartient à l’entreprise d’assurance de prendre clairement position :

L'interruption de la prescription suppose que la personne lésée puisse déterminer avec certitude, à la réception de la communication écrite de l'assureur, si ce dernier indemnisera son préjudice.

Le juge du fond apprécie en fait si la communication de l'assureur remplit cette condition.

Il appartient cependant à la Cour de vérifier si, de ses constatations, le juge a légalement déduit que tel est le cas.

Analyse du Jugement

Le jugement attaqué constate que, « par une lettre du 15 juin 2012, la [défenderesse] a adressé au conseil de [la personne lésée, auteur des demandeurs,] une offre de règlement [de 960 euros] qui a été refusée en l'état », le paiement de cette somme ayant été effectué le 11 décembre 2012 au profit de cette personne et que cette offre « mentionnait [que] 'la présente proposition est faite sans reconnaissance de responsabilité et sans préjudice aux droits et actions de l'assuré. D'autre part, en cas de discussion sur le montant offert, nous retrouvons notre entière liberté d'appréciation' ».

Il considère que « l'offre de règlement [du 15 juin 2012 constitue] une décision d'indemnisation qui a été concrétisée par le paiement intervenu le 11 décembre 2012 » et que, « même si la [défenderesse] a émis des réserves qu'elle explique être justifiées pour ne pas préjudicier à son assuré, à tout le moins le 11 décembre 2012, [l'auteur des demandeurs] ne pouvait plus ignorer que la [défenderesse] avait décidé de l'indemniser puisque le paiement est intervenu ».

Le jugement attaqué n'a pu légalement déduire de ces énonciations que, à la réception de la lettre du 15 juin 2012, l'auteur des demandeurs a pu déterminer si la défenderesse indemniserait son préjudice, partant, qu'elle a fait cesser l'interruption de la prescription.

Conditions de l'Interruption

En d’autres termes, pour que cesse l'interruption de la prescription, il appartient à l’entreprise d’assurance de s'exprimer de manière suffisamment claire pour que le bénéficiaire puisse savoir avec certitude si son préjudice sera ou non indemnisé.

La jurisprudence et la doctrine avaient déjà eu l’occasion de rappeler que la position de l’assureur doit nécessairement se manifester par un accord ou un refus d’indemnisations clair et définitif. Il ne semble pas y avoir de voie moyenne. Si l’assureur subordonne sa décision à une expertise ou une enquête, la période d’interruption ne prend pas fin. Il en va de même lorsque l’assureur informe son assuré qu’il attend les résultats de l’enquête pénale avant de prendre attitude. (Dubuisson, B. et CALLEWAERT, V., « La prescription en droit des assurances », R.G.A.R., 2011/1, p. 14702.)

Notification de la Décision

Par ailleurs, rappelons que dans un arrêt du 18 avril 2016, la Cour de cassation a considéré que la notification de la décision de l’assureur doit être faite à l’autre partie personnellement ou au mandataire qu’elle a chargé de recevoir.

Une notification faite au courtier ou à l’assureur protection juridique de l’assuré ou encore à l’avocat de celui-ci, s’il n’est pas établi qu’il a reçu un mandat exprès pour la recevoir, ne répond dès lors pas au prescrit légal. (Paris, C., « Chapitre 6 - Prescription » in Manuel de droit des assurances, 1e édition, Bruxelles, Larcier, 2021, n°353)

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