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Majoration tarifaire et paiement de la prime

Denis Gouzée Denis Gouzée

L'article de Gilles Quoistiaux dans L'Echo souligne que certaines primes d'assurance non-vie sont sous-évaluées de 8% en raison de l'inflation, incitant les assureurs à augmenter leurs tarifs. Une majoration tarifaire nécessite une notification au preneur d'assurance, qui peut résilier son contrat. Cette notification doit être faite au moins quatre mois avant l'échéance annuelle. Le paiement de la prime après notification ne vaut pas systématiquement acceptation des modifications, surtout si le preneur n'est pas clairement informé. Il est conseillé de consulter son courtier avant tout paiement pour clarifier la situation.
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Assurance - Responsabilité - Roulage

Article du 9 novembre 2022

Dans un article de ce 9.11.2022 de l’Echo, le journaliste GILLES QUOISTIAUX écrit : «D'après les calculs de l'Institut des Actuaires, certaines primes d'assurance non-vie ne tiennent pas encore compte de l'inflation et sont donc sous-évaluées de 8%. Plusieurs compagnies commencent à adapter leurs tarifs à la hausse.»

Rappels sur les règles de majoration tarifaire

Il est alors bon de rappeler certaines règles.

Une majoration tarifaire peut être appliquée en cours de contrat, dans les assurances non-vie, mais elle nécessite l’avertissement du preneur d’assurance et la possibilité pour lui de résilier la police.

Cette majoration ne peut être appliquée qu’aux primes venant à échéance à partir du 1er jour du 4e mois suivant la modification tarifaire. Le preneur d’assurance doit être averti de cette modification au moins 4 mois avant l’échéance annuelle de son contrat ; en cas de notification ultérieure, il doit avoir un délai d’au moins trois mois à compter de celle-ci pour résilier la police.

Le droit de résiliation doit être formellement mentionné dans la notification (A.R. 22 févr. 1991 portant règlement général relatif aux contrôles des entreprises d’assurances, art. 12, al. 3).

(En ce qui concerne le groupe d'activités " non-vie ", lorsqu'une entreprise d'assurances augmente ou diminue un tarif, elle applique cette modification aux primes et cotisations des contrats en cours qui viennent à échéance à partir du premier jour du quatrième mois qui suit la modification, sans préjudice du droit du preneur d'assurance à la résiliation du contrat.) (Le preneur d'assurance est averti de la modification tarifaire au moins quatre mois avant l'échéance annuelle de son contrat d'assurance, à moins que lors d'une notification ultérieure de la modification tarifaire, le droit lui soit encore accordé de résilier son contrat dans un délai de trois mois au moins à compter du jour de ladite notification. Le droit de résiliation est formellement mentionné dans la notification.)

Délai de résiliation et paiement de la prime

Etant donné que les polices d’assurance sont conclues en principe pour un an et se renouvellent tacitement, sauf résiliation trois mois au moins avant l’échéance, cela signifie que le preneur d’assurance disposera d’un délai d’un mois pour résilier sa police (L. 04 avril 2014, art. 85).

Qu’en est-il, lorsque le preneur a payé la prime à la réception mais souhaite, néanmoins, résilier le contrat ? Généralement, l’assureur fera valoir que ce paiement vaut acceptation tacite de la majoration tarifaire.

Opinion de la FSMA sur la modification d’un contrat d’assurance

Le 9 septembre 2015, la FSMA a émis une opinion concernant la modification d’un contrat d’assurance via silence circonstancié. Sa conclusion est la suivante :

Les principes suivants sont formulés par la FSMA.

En l’état actuel du droit, et d’un point de vue strictement juridique, les règles et principes de droit énoncés ci-dessus restent applicables : une modification d’un contrat d’assurance nécessite l’accord des deux parties concernées et la preuve de cet accord doit être fournie conformément à l’article 64 de la loi du 4 avril 2014 précité.

Si un assureur décide, sous sa propre responsabilité, d’appliquer une procédure qui implique que le preneur d’assurance ne donne pas nécessairement son accord par écrit, les preneurs d’assurance doivent en être dûment informés. Concrètement, les clients doivent être informés du caractère singulier de la procédure suivie et notamment du fait que celle-ci peut mener à une modification de leur contrat même en l’absence de leur accord explicite. En outre, l’assureur veillera à expliquer les raisons qui le conduisent à appliquer cette procédure.

Dans tous les cas, les documents fournis aux preneurs d’assurance contiennent un aperçu clair des changements qui sont apportés au contrat d’assurance et de la raison d’être de ces modifications. L’impact éventuel de ceux-ci sur les garanties du contrat et sur les droits et obligations des parties est clairement mentionné. Les choix éventuels dont dispose le preneur d’assurance sont également détaillés.

En cas de contestation, il incombera à l’entreprise d’assurance de démontrer que le silence circonstancié du preneur d’assurance et le paiement de la prime du contrat d’assurance valent acceptation des modifications proposées et preuve de celle-ci.

https://www.fsma.be/fr/opinion/modification-dun-contrat-dassurance-silence-circonstancie

Doctrine sur la théorie du silence circonstancié

Quant à la doctrine, elle se montre également sévère face à la théorie du silence circonstancié :

Le plus souvent, l’assureur annonce, par un écrit, la modification du contrat et y mentionne que le preneur d’assurance a le droit de le résilier dans un délai déterminé. Dans l’état actuel de la loi, on ne peut pas systématiquement considérer que le paiement de la prime, effectué après la notification de la modification, emporte l’acceptation du preneur d’assurance sur le contrat modifié.

Cela peut dans certaines circonstances être le cas, à la condition que ce paiement ne soit susceptible d’aucune autre interprétation. Quand la modification est annoncée au verso de l’avis d’échéance, sans que l’assureur attire l’attention du preneur d’assurance sur ce changement, on ne peut pas toujours considérer que le paiement de la prime, effectué par la suite, implique un accord de sa part.

Ce paiement pourrait aussi être analysé comme un accord de continuer aux conditions anciennes. Il se pourrait que le preneur n’ait même pas vu que le contrat allait être modifié. De même, lorsque la prime est régulièrement payée par domiciliation, le paiement qui suit l’annonce de la modification ne peut pas traduire, de manière certaine et non équivoque, le consentement du preneur d’assurance.

(Paris, C., « Chapitre 4 - Modification du contrat » in Manuel de droit des assurances, 1e édition, Bruxelles, Larcier, 2021, p. 315-327)

Conclusion

Une augmentation de la prime peut donc être l’occasion de revoir avec son courtier la situation. Nonobstant ce qui précède, il est toujours préférable de voir celui-ci avant de payer la nouvelle prime.

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