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Modification du bien sinistré

Denis Gouzée Denis Gouzée

L'article aborde la décision de la Cour d'Appel de Liège concernant la responsabilité de l'assuré après un dégât des eaux. L'assuré a réparé le bien sinistré sans informer son assureur, rendant difficile la détermination des causes du sinistre. La cour a jugé que cette action constituait une faute, permettant à l'assureur de réduire sa charge de preuve. Toutefois, l'article 110 de la loi stipule que l'assuré ne peut modifier le bien sans nécessité. La cour aurait dû préciser que l'assuré a ainsi empêché l'assureur de prouver l'exclusion de la garantie.
Illustration
Assurance - Responsabilité - Roulage

Responsabilité de l'assuré en cas de sinistre

L'assuré ne peut, de sa propre autorité, apporter sans nécessité au bien sinistré des modifications de nature à rendre impossible ou plus difficile la détermination des causes du sinistre ou l'estimation du dommage. Par un arrêt du 16 novembre 2020, la Cour d’Appel de Liège se montre extrêmement sévère.

Cas d'un dégât des eaux

Un assuré avait été victime d’un dégât des eaux et sollicitait l’intervention de son assureur. L’assureur contestait la cause du sinistre déclaré, mais pas la réalité du dommage causé.

La cour considéra qu’il appartenait à l’assureur d’établir que la cause du sinistre ne s’inscrivait pas dans une hypothèse de non-couverture.

L’assureur faisait alors valoir que la détermination de la cause du sinistre n’était plus possible dès lors que l’assuré avait immédiatement procédé à la réparation du raccord défectueux, sans prévenir son assureur, sans lui permettre d’opérer la moindre constatation, sans prendre de photographies probantes et sans conserver leur accord qui aurait été remplacé.

La compagnie faisait valoir que la cause du sinistre devait être recherchée dans une protection insuffisante des canalisations contre le gel, hypothèse exclue de la couverture.

Faute de l'assuré et charge de la preuve

La cour considéra alors qu’en procédant à la réparation de manière telle à ce que l’assureur ne puisse plus déterminer les causes du sinistre, l’assuré avait commis une faute qui justifiait un allégement de la charge probatoire qui repose sur l’assureur et que, dès lors : « une vraisemblance suffisante d’une cause de sinistre non couverte pouvait être considérée comme satisfaisante ».

La formule est malheureuse. Certes, l’article 110 de la loi énonce que :

« L'assuré ne peut, de sa propre autorité, apporter sans nécessité au bien sinistré des modifications de nature à rendre impossible ou plus difficile la détermination des causes du sinistre ou l'estimation du dommage. »

Toutefois, la sanction d’un tel manquement n’est pas un allégement de la charge de la preuve. Cette même disposition légale prévoit en effet clairement que :

« Si l'assuré ne remplit pas l'obligation visée à l'alinéa 1er et qu'il en résulte un préjudice pour l'assureur, celui-ci a le droit de prétendre à une réduction de sa prestation à concurrence du préjudice qu'il a subi ou de réclamer des dommages et intérêts. »

Hypothèse de non-couverture

L’assureur ne peut décliner sa garantie que dans l’hypothèse où l’assuré a manqué à son obligation dans une intention frauduleuse.

Même si la question fait débat, la Cour d’appel n’aurait-elle pas été mieux inspirée en faisant valoir que les exclusions font partie de la définition de la garantie et qu’il appartient à l’assuré de démontrer que le sinistre n’est pas exclu par la police ? Compte tenu des modifications apportées, l’assuré n’était pas en mesure de rapporter cette preuve.

Il est vrai qu’il est généralement considéré (à mon sens à bon droit) que l’exclusion est une exception au sens de l’article 1315, alinéa 2, du Code civil, dont la preuve incombe à l’assureur.

Application de l'article 110

Alors, faisons une juste application de l’article 110, la cour aurait pu énoncer qu’en apportant des modifications, l’assuré avait privé l’assureur d’une chance de rapporter la preuve que le sinistre n’était pas couvert.

La Cour aurait alors été conduite à déterminer le préjudice en résultant pour l’assureur conformément à l’article 110.

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