oppositionexcuse légitimeCode d'Instruction Criminelleprévenunégligenceforce majeuredroit à une nouvelle audienceresponsabilité judiciaire

Opposition et excuse légitime

Denis Gouzée Denis Gouzée

La réforme du Code d'Instruction Criminelle a restreint la possibilité pour un prévenu condamné par défaut de faire opposition. Cependant, un arrêt de la Cour de Cassation du 27/2/2019 nuance cette restriction en affirmant que l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme garantit le droit à une nouvelle audience. La Cour a annulé une décision des juges d'appel qui avaient jugé l'opposition non avenue en raison de la négligence du prévenu. Elle a affirmé qu'une absence, même due à une négligence, peut constituer une excuse légitime, à condition qu'elle ne soit pas interprétée comme une renonciation au droit de se défendre.
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Restriction de la faculté d'opposition

La dernière réforme du Code d’Instruction Criminel avait eu pour effet de restreindre sensiblement la faculté du prévenu condamné par défaut de faire opposition. Un arrêt de la Cour de Cassation du 27/2/2019 permet de nuancer cette restriction en se fondant sur l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Article 187 du Code d’instruction criminelle

L’article 187, paragraphe 6, 1°, du Code d’instruction criminelle énonce :

L'opposition sera déclarée non avenue : 1° si l'opposant, lorsqu'il comparaît en personne ou par avocat et qu'il est établi qu'il a eu connaissance de la citation dans la procédure dans laquelle il a fait défaut, ne fait pas état d'un cas de force majeure ou d'une excuse légitime justifiant son défaut lors de la procédure attaquée, la reconnaissance de la force majeure ou de l'excuse invoquées restant soumise à l'appréciation souveraine du juge.

Cas d'un prévenu condamné par défaut

Un prévenu reprochait aux juges d’appel d’avoir dit son opposition non avenue en déduisant la renonciation à participer à l’audience d’une négligence et d’un désintérêt manifeste pour la procédure au motif qu’il n’a pas vérifié au greffe la date de la remise de la cause.

Décision de la Cour de Cassation

La Cour casse la décision attaquée pour les motifs suivants :

L’article 6 de la Convention, tel qu’il est interprété par la Cour européenne des droits de l’homme, exige qu’un prévenu condamné par défaut ait la possibilité qu’une juridiction statue à nouveau, après l’avoir entendu, sur le bien-fondé de l’accusation, à moins qu’il soit établi qu’il a renoncé à son droit de comparaître et de se défendre ou qu’il a eu l’intention de se soustraire à la justice.

Il s’ensuit que la notion d’excuse légitime visée à l’article 187, paragraphe 6, 1°, du Code d’instruction criminelle doit être interprétée en ce sens qu’elle couvre les cas où l’opposant, qui a eu connaissance de la citation, n’invoque pas la force majeure mais un motif faisant apparaître que son absence n’emportait aucune renonciation à son droit de comparaître et de se défendre, ou aucune volonté de se soustraire à la justice.

La seule circonstance que l’absence de l’opposant résulte de sa propre négligence n’exclut pas l’existence d’une excuse légitime au sens de la disposition précitée.

Le juge apprécie souverainement les éléments invoqués à l’appui de l’excuse légitime, la Cour vérifiant toutefois s’il n’a pas déduit de ses constatations des conséquences qui seraient sans lien avec elles ou qui ne seraient susceptibles, sur leur fondement, d’aucune justification.

Constatations de l'arrêt

L’arrêt constate d’abord que la cause a été introduite à l’audience du 4 septembre 2013 et a été reportée à quatre reprises, contradictoirement à l’égard du demandeur qui, à ces occasions, a été représenté par son conseil ou assisté par celui-ci.

Il énonce ensuite admettre l’erreur d’agenda invoquée par le demandeur pour justifier son absence à l’audience mais relève que celui-ci, bien que sachant que la cause était fixée à une audience de la cour d’appel à un moment ou à un autre, n’a entrepris aucune vérification auprès du greffe et ne précise pas quelle autre date il aurait retenue.

En déduisant de cette absence de vérification de la date d’audience que le demandeur a renoncé au droit de comparaître et de se défendre, les juges d’appel n’ont pas pu légalement justifier leur décision.

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