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La notion de consommateur et ses implications dans la loi du 9 octobre 2023 sur la résiliation des contrats d'assurance

Denis Gouzée Denis Gouzée

La loi du 9 octobre 2023 facilite la résiliation des contrats d'assurance non-vie pour les consommateurs, leur permettant de résilier à tout moment après la première année. Toutefois, la définition du "consommateur" reste floue, entraînant des difficultés pratiques, notamment pour les contrats à usage mixte. Les compagnies d'assurance peuvent adopter des approches variées, créant des inégalités dans le traitement des assurés. Les intermédiaires d'assurance, bien que proches des clients, ne doivent pas être tenus responsables des décisions des assureurs. Une clarification des règles et une harmonisation des pratiques sont nécessaires pour garantir une résiliation équitable et transparente.
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Introduction

La loi du 9 octobre 2023 a introduit des dispositions innovantes permettant aux consommateurs de résilier plus facilement leurs contrats d'assurance non-vie. Ces dispositions concernent principalement les contrats d'assurance non-vie couvrant les consommateurs. Parmi ces nouvelles mesures, les consommateurs ont désormais la possibilité de résilier leur contrat à tout moment après la première année. Cette avancée législative soulève des questions cruciales concernant la définition précise de la notion de "consommateur". En effet, la jurisprudence fluctuante de la Cour de cassation et les interprétations divergentes que chaque compagnie d'assurance pourrait adopter pourraient entraîner des incertitudes et des controverses.

Définition du consommateur et difficultés pratiques

La définition du consommateur, telle que reprise dans le Code de droit économique, se réfère à une personne physique agissant à des fins à caractère non professionnel. En théorie, cette distinction semble claire. Cependant, en pratique, il est souvent difficile de différencier la consommation personnelle de la consommation professionnelle, notamment dans le cas de contrats mixtes.

Pour bien aborder la notion de consommateur dans le cadre de la loi, il est essentiel de considérer deux aspects : d'une part, la qualité de consommateur du preneur d'assurance et, d'autre part, la nature du risque assuré. Ces deux dimensions doivent être prises en compte pour déterminer si un contrat peut bénéficier des règles spécifiques aux consommateurs.

Prenons l’exemple d’un avocat qui emploie son véhicule à la fois pour des déplacements personnels et professionnels. La jurisprudence de la Cour de cassation met en évidence que la présence d'une finalité professionnelle dans un contrat ne permet pas d’écarter la qualification de consommateur. De même, la nature du risque couvert par le contrat doit être évaluée : si le risque est principalement lié à des activités non professionnelles, le contrat pourrait être qualifié comme étant destiné à un consommateur. Cette complexité rend difficile pour les assureurs de déterminer de manière uniforme si un preneur d'assurance doit être considéré comme un consommateur.

De plus, il est important de considérer si le preneur d'assurance est une personne physique ou une personne morale. Un même risque mixte pourrait susciter des appréciations différentes selon qu'il est assuré par une personne physique ou une personne morale. En effet, les contrats souscrits par des personnes morales ne peuvent généralement pas être qualifiés de contrats destinés à des consommateurs, même si le risque couvert concerne en partie une utilisation privée. Cette distinction introduit une complexité additionnelle susceptible d’entraîner des inégalités dans le traitement réservé aux assurés.

Approches diverses des compagnies d'assurance

Chaque compagnie d'assurance pourrait adopter sa propre approche pour qualifier un contrat, ce qui entraînerait des disparités significatives entre les assurés. Cette incertitude pourrait générer des situations dans lesquelles le preneur d'assurance ne comprend pas pourquoi certaines clauses ou options de résiliation lui sont appliquées ou refusées.

Prenons l'exemple d'une entreprise individuelle utilisant une assurance habitation à des fins mixtes. Selon la compagnie d'assurance, cette police pourrait être qualifiée différemment, induisant des traitements inégaux d'un assureur à l'autre. Cette variabilité nuit à l'objectif de transparence et d'équité des règles de résiliation.

Le rôle des intermédiaires d'assurance

Dans une récente publication du journal Le Forum de l'assurance, on peut lire que l'intermédiaire d'assurance, qui entretient une relation directe avec son client, est idéalement placé pour comprendre l’assuré et le risque à couvrir. Cela lui permet d'intervenir, si nécessaire, dans le processus de résiliation pour s’assurer que la demande est traitée correctement. Cependant, cette opinion est contestable. Une telle responsabilité ne peut pas être mise à charge de l'intermédiaire, qui n'a aucune influence sur l'appréciation qui est faite par la compagnie d'assurances.

Les intermédiaires ne disposent pas du pouvoir de décision finale sur l'appréciation des demandes de résiliation, pouvoir qui appartient uniquement aux compagnies d'assurance. Leur rôle devrait se limiter à informer et orienter les preneurs d'assurance, sans porter la responsabilité de l'issue des démarches. Or, cette pression risque d'aboutir à des situations injustes où les intermédiaires se retrouvent tenus responsables de décisions qu'ils ne maîtrisent pas.

Il serait préférable d’établir des critères plus clairs pour déterminer la qualification des contrats et les règles applicables. Cela permettrait de garantir l’application uniforme des nouvelles dispositions. Cela allégerait la charge qui pèse sur les intermédiaires tout en améliorant la transparence pour les consommateurs.

La nécessité de clarifier les règles de résiliation

Ainsi, la question de la définition du consommateur est centrale et illustre un enjeu majeur pour le secteur de l'assurance. Une application harmonisée et cohérente des nouvelles règles de résiliation est indispensable pour préserver à la fois la protection des assurés et l'équité entre les divers acteurs du marché des assurances.

Pour y parvenir, il semble crucial d'établir des lignes directrices claires et communes à toutes les compagnies. Ces lignes directrices faciliteraient non seulement le travail des intermédiaires, en leur offrant des critères uniformes sur lesquels s'appuyer, mais garantiraient également une expérience client sans ambiguïté. Cela contribuerait à réduire les disparités de traitement entre les assurés et à renforcer la confiance dans le système d'assurance.

Conclusion

En conclusion, la loi du 9 octobre 2023 constitue une avancée importante dans la protection des consommateurs en assurance. Cependant, sa mise en œuvre pratique est entravée par les incertitudes qui entourent la notion de "consommateur". Il est crucial de clarifier cette notion et de standardiser les procédures entre les compagnies d'assurance pour assurer une résiliation équitable et transparente des contrats, tout en ne faisant pas supporter au courtier une responsabilité qui ne lui incombe pas.

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